jeudi 10 juin 2010

Deux romans pour les vacances

Alors, cette année, je prends quels livres pour partir en voyage? Tout ce que vous voudrez. Mais, en raison du côté pratique de leur faible encombrement, je vous conseille des poches. En voici deux. Il y en aura d'autres, bientôt.

En commençant par le premier roman traduit en français de l'Américaine Katherine Mosby, Sous le charme de Lillian Dawes - il y en aura un autre à la rentrée, je l'espère aussi bon que celui-ci.
Lillian Dawes est une étrange jeune femme. Elle surgit là où on ne l’attend pas. Elle est capable de gestes surprenants. Elle semble à l’aise partout. Mais elle se fait appeler de trop de noms différents pour être honnête et cache quelque chose. Serait-elle une espionne? Gabriel, presque 18 ans, est le premier à être fasciné par elle et à se poser des questions, autant sur Lillian que sur le sentiment encore inconnu qu’il éprouve. Son frère Spencer craque à son tour.
Au rythme sans précipitation d’une danse de séduction langoureuse et démodée, le roman de Katherine Mosby charme irrésistiblement. Il installe les protagonistes avec finesse. Retient dans l’ombre des éléments mystérieux dont l’importance sera révélée plus tard. Dépeint avec talent une partie de campagne pleine d’incidents. Lillian pratique l’art du trompe-l’œil jusque dans son appartement. La romancière aussi, qui nous installe au cœur du paysage.

En deuxième choix (qui aurait pu être le premier), voici l'Espagnol Eduardo Mendoza et Les aventures miraculeuses de Pomponius Flatus.
Pomponius Flatus est philosophe et naturaliste. Romain, comme tous les lecteurs d’Astérix l’auront deviné. Dans les premières années de l’ère chrétienne, il échoue en Palestine un peu par hasard, après avoir cherché en vain dans les environs une eau qui procure la sagesse à celui qui en boit. Il est malade. Peut-être son nom le prédispose-t-il aux flatulences, sonores et nauséabondes, accompagnées de diarrhées qui le font atrocement souffrir. Il faudrait un miracle…
Coup de chance: il est à Nazareth où grandit le jeune Jésus, inconscient encore de son destin. Comme un Harry Potter en phase d’apprentissage, Jésus est déjà capable de choses étonnantes. Mais il faudra attendre la fin du roman pour s’en rendre compte.
Car il y a d’autres urgences. Joseph, son père menuisier, est accusé de meurtre et condamné à mort. Il a été chargé de construire lui-même la croix sur laquelle il sera supplicié. Jésus ne peut pas croire que Joseph ait tué Epulon. Pomponius, qui trouve le gamin sympathique, accepterait-il de l’aider à prouver son innocence? Et pourquoi pas? L’affaire roule, contre vingt deniers.
Pendant ce temps, la première croix de Joseph a été refusée par le tribun Appius Pulcher, chargé de l’exécution du menuisier, au prétexte qu’il n’a jamais commandé une croix en X. En réalité, Appius n’accorde aucune importance au modèle. Mais il lorgne sur une fructueuse affaire immobilière pour laquelle il n’a pas le premier sou: il veut investir dans l’achat d’un terrain sur lequel se bâtira prochainement un quartier neuf, et dont la valeur augmentera. Sa mission de justicier devrait donc se prolonger un peu, le temps de rassembler la somme nécessaire à fonder sa fortune à venir.
Joseph retourne au travail. Et refuse de livrer à Pomponius le secret qui pourrait le sauver: il a eu en effet, avant la mort d’Epulon, une discussion animée avec celui-ci. Mais Joseph, honnête homme, a juré le secret. Un serment plus important à ses yeux que la menace de sa prochaine crucifixion.
Honnête homme et honnête menuisier, il fait si bien que la nouvelle croix est bientôt prête. Appius pourra-t-il encore retarder l’exécution? Peut-être, s’il trouve deux autres condamnés pour obliger Joseph à fabriquer deux nouvelles croix. Grâce à des péripéties qui sont autant de trouvailles, les trois croix ne serviront pas. Du moins, pas tout de suite…
Eduardo Mendoza s’infiltre dans les années les moins connues d’une histoire bien connue. Les contraintes sont nombreuses, parce qu’il respecte la version proposée par les Evangiles. Mais sa liberté est grande, et il en profite avec une allégresse plaisante à partager.
Lazare, le lépreux, n’est pas encore mort et mendie dans Nazareth en accusant Jésus et d’autres jeunes gredins de lui lancer parfois des pierres. Marie, dont la réputation a souffert à la naissance de son fils puisqu’il s’est beaucoup répété que Joseph n’en était pas le père, sourit doucement et n’en pense pas moins – elle est bien la seule, avec le lecteur, à avoir une idée de la suite. Marie-Madeleine, qui ne s’appelle pas encore ainsi, survit à la mort de sa mère dont elle reprendra la profession de prostituée.
Tout le monde est là. Et tout reste à faire pour Mendoza qui passe par là.

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