jeudi 23 mai 2013

Mario Vargas Llosa face à deux colonialismes

Roger Casement. Le nom ne nous est pas inconnu. Celui dont Mario Vargas Llosa a fait le héros de roman, Le rêve du Celte, s’est rendu célèbre par son combat contre l’exploitation humaine. D’abord au Congo, propriété de Léopold II, où Casement accompagne Stanley en 1884. « Est-ce cette nuit-là que sa Sainte Trinité personnelle des trois C avait volé en éclats ? Jusqu’alors il croyait que le colonialisme se justifiait par eux : christianisme, civilisation et commerce. » La réalité est moins idéale. Stanley n’est pas là pour apporter la civilisation mais pour servir le monarque belge. Casement découvre l’exploitation humaine, une abomination, et entreprend de le faire savoir. A Joseph Conrad, notamment, qui tirera Au cœur des ténèbres du voyage où il a rencontré Casement. Et au monde entier, avec un Rapport sur le Congo qui nourrit, dans Le soliloque du roi Léopold, de Mark Twain, les cauchemars du souverain.
Vargas Llosa utilise les vingt années africaines du personnage. Et, plus tard, ses missions officielles en Amérique latine. Sur un terrain que se disputent le Pérou et la Colombie, il dénonce le même type de sévices exercés, cette fois, par une société britannique. Humanitaire avant l’heure, il devient consul, il discute avec le président des Etats-Unis, il est même anobli.
Mais, en mesurant les dégâts d’une occupation étrangère au Congo et en Amazone, un parallèle s’impose à sir Roger Casement : l’Irlande, d’où il vient, est aussi, d’une certaine manière, une terre colonisée. Et il se rapproche, d’abord par les idées, ensuite par les actes, des indépendantistes dont certains prônent l’action violente. De plus en plus, il considère les ennemis de l’Angleterre comme des alliés objectifs de l’Irlande. L’Allemagne, entrée en guerre en 1914, lui semble donc un parfait associé de circonstance. Il négocie l’envoi d’armes, tente de monter une Brigade irlandaise parmi les soldats prisonniers des Allemands, regagne l’Irlande en sous-marin. Et est accusé de traîtrise, arrêté, condamné à mort…
Vargas Llosa a choisi un point d’ancrage : la cellule où Casement attend de savoir s’il sera gracié ou exécuté. Cela lui laisse le temps de méditer sur une vie qui se déploie autour de quelques principes et de quelques erreurs. Le romancier péruvien, prix Nobel 2010, en profite pour saisir l’homme dans ses errements. Sans révolutionner l’art de la fiction, mais en lui donnant un souffle impressionnant.

1 commentaire:

  1. un livre magnifique que j'ai lu d'une traite et qui reste en mémoire pour toujours
    Le personnage de Casement malgré ses faiblesses est vraiment superbe et est un bel exemple d'humanisme

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