lundi 11 août 2014

Vers la rentrée (12) avec Thomas Pynchon

Waw! Le discret Thomas Pynchon donne avec Fonds perdus le grand roman du début du 21e siècle. Situé très exactement entre le début du printemps 2001 et celui de 2002, il englobe, bien sûr, le 11 septembre, mais aussi un nombre considérable d'éléments liés aux flux de capitaux et de données, l'articulation fragile sur laquelle repose notre univers. Dans une langue inventive que le traducteur, Nicolas Richard, a restituée avec talent en français (j'ai effectué quelques petites vérifications), il soigne chaque détail sans jamais oublier la vue d'ensemble. Un livre monstrueusement excitant, à ne manquer sous aucun prétexte.

Fonds perdus, selon son éditeur

New York, début des années 2000, entre l'éclatement spectaculaire de la bulle Internet et l’effondrement des tours jumelles. Maxine, jeune mère new-yorkaise à la vie amoureuse mouvementée, est une inspectrice des fraudes qui a perdu sa licence officielle pour avoir trop bien conseillé un client véreux. Elle n’a pourtant pas remisé son pistolet, et la voilà embarquée malgré elle dans une aventure haletante et dangereuse: comment se fait-il que la start-up du très louche Gabriel Ice n’ait pas bu le bouillon alors que l’ensemble du marché du Net s’est brutalement dégonflé quelques mois auparavant? D’où viennent les flux de capitaux qui circulent vers de mystérieux comptes à l’étranger? Pour le savoir, Maxine, entourée par une ribambelle de personnages décalés, va devoir plonger et éviter de se perdre dans le Web Profond, cette interzone quasi inaccessible, refuge des hackers anarchistes, des cybervoyous et des âmes perdues.

L'auteur, Thomas Pynchon

Thomas Pynchon, né en 1937 dans l'État de New York, est l'un des hommes les plus secrets de la littérature américaine. Originaire de Long Island, il commença des études d'ingénieur à l'université Cornell mais arrêta à la fin de sa deuxième année pour rejoindre l'US Navy. Il retourna à Cornell en 1957 pour suivre des études de lettres et commença à publier au début des années 60.

Les premières lignes

C’est le premier jour du printemps 2001, et Maxine Tarnow, que certains ont encore dans leur système sous le nom de Loeffler, accompagne ses enfants à pied à l’école. D’accord, ils ont peut-être passé l’âge de se faire escorter, peut-être que Maxine ne veut pas les lâcher comme ça tout de suite, mais ce n’est qu’à deux rues, c’est sur le chemin du bureau, elle aime bien, et alors?
Ce matin, tout le long des rues, on dirait que chaque poirier de Chine de l’Upper West Side a éclos dans la nuit en grappes de fleurs blanches. Tandis que Maxine les contemple, le soleil se hisse au-dessus de la ligne des toits et des réservoirs d’eau, atteint le bout du pâté de maisons et pénètre dans un arbre en particulier qui d’un seul coup est empli de lumière.
«M’man?», Ziggy, avec son empressement habituel. «Allez, yo!»
«Les garçons, jetez donc un œil, cet arbre, là…»
Otis prend une seconde pour regarder. «Super, m’man.»
Zig est du même avis: «Pas naze.»

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