mercredi 19 novembre 2014

Prise de bec autour du Goncourt des Lycéens

David Foenkinos attise les passions, qui l'eût cru? Après le Goncourt des Lycéens qui succédait au Renaudot pour Charlotte, David Caviglioli a publié hier soir, sur le site de L'Obs, dans sa partie Bibliobs, un article, "Charlotte": le problème avec Foenkinos, que j'aurais volontiers signé si j'avais son talent. Je vous conseille vivement de le lire toutes affaires cessantes. Je lui ai en tout cas, lors d'une délibération secrète avec moi-même, décerné le Prix du Meilleur Article de la Rentrée sur David Foenkinos. D'avoir ensoleillé les premiers moments de ma journée, à une heure où le soleil se trouvait encore de l'autre côté de l'horizon, méritait bien ça.
Tout le monde n'a pas apprécié autant que moi, si j'en juge par le tweet posté en réponse par Bernard Lehut, journaliste littéraire à RTL. Jugez vous-mêmes.


Tout le monde a le droit d'apprécier les livres de David Foenkinos et, partant, les choix du Renaudot ainsi que du Goncourt des Lycéens. On a aussi le droit d'apprécier moins, de le dire, de l'écrire.
Mais s'il y avait, plutôt qu'un problème avec Foenkinos, un problème avec le Goncourt des Lycéens?
Avant d'expliquer pourquoi je me pose la question, il faut dire quand même, non pour désamorcer les remarques aigres-douces que cette note de blog suscitera peut-être, mais parce que je le pense sincèrement, pourquoi c'est bien, le Goncourt des Lycéens.
C'est bien parce qu'une génération réputée réfractaire à la lecture se trouve confrontée à de la littérature contemporaine et que les participants aux jurys, à différents niveaux, se passionnent, si j'en crois ce que je lis ici ou là (et j'ai très envie de le croire), pour leurs lectures.
C'est bien parce que, repensant à la manière dont j'ai abordé la littérature à l'âge de ces lycéens, je me rappelle que les enseignants donnaient l'impression de la présenter comme une langue aussi morte que le latin - car j'étudiais aussi, ou plutôt j'étais censé étudier le latin. Et voici, pour ces jeunes jurés, des livres publiés de frais ainsi que des rencontres avec des auteurs en chair et en os. (Je n'avais que l'os, à mon époque et dans mon milieu.)
C'est bien parce qu'un prix littéraire de plus reste, malgré tout le mal qu'on peut penser du système, une occasion de projeter un livre, des livres, dans l'actualité. Jamais je ne m'en lasserai, quels que soient ces livres et leurs mérites ou défauts respectifs.
MAIS...
Le revers de la médaille, ce sont peut-être bien les rencontres des candidats au Goncourt des Lycéens avec celles et ceux qui vont choisir entre eux.
Car enfin, qu'y a-t-il de plus important que le texte dans un livre? Celui qui l'a écrit a-t-il pour fonction d'en être l'auteur ou de le défendre? (J'ai failli dire: de le vendre.) La chair et l'os s'animent, sont plus ou moins sympathiques, et qui va me faire croire que cela n'influence pas le jugement des lecteurs, amenés à oublier les éventuelles scories d'un ouvrage parce que son auteur en parle si bien / qu'il est si beau / qu'il est drôle / qu'il a une présence... une présence, quoi, presque une aura?
Donc, le Goncourt des Lycéens est-il attribué à un roman ou à son auteur?
Vous me direz qu'il en va peut-être de même pour les prix littéraires traditionnels, le milieu de l'édition étant, comme tous les milieux, propre à engendrer amitiés ou inimitiés qui pèsent probablement au moment des votes.
Certes. Il n'empêche que le couronnement de David Foenkinos (et les votes pour Grégoire Delacourt) s'explique mieux quand on se pose des questions de ce genre.

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