lundi 2 novembre 2015

Christine Angot, Prix Décembre

C'est franchement une déception. Il y avait deux autres sélectionnés, que je vous conseille de lire: Michaël Ferrier avec Mémoires d'outre-mer et Judith Perrignon avec Victor Hugo vient de mourir. Mais Christine Angot, à l'usure, à force d'être toujours là et d'enfoncer toujours le même clou, est la lauréate du Prix Décembre pour Un amour impossible.
Christine Angot a changé, nous dit-on. Il faut le prendre comme une bonne nouvelle car, de L’inceste à Une semaine de vacances, elle campait sur un registre qui allait finir par épuiser plusieurs générations de lecteurs. L’autofiction a bon dos, même si l’auteure ne s’en réclame pas, fût-elle « sans concession » comme le rappelle à bon droit son éditeur. Et Christine Angot, quoi qu’on prétende, n’a pas changé : elle s’est contentée de modifier l’angle.
Après avoir braqué, plusieurs fois, les projecteurs sur la relation avec son père, elle met maintenant en lumière celle avec sa mère. Mais on a l’étrange et désagréable impression que cette lumière vient du père : la personnalité de Pierre, érudit exigeant et, accessoirement (?), amant incestueux, continue à dominer le paysage. Qui, du coup, ne semble pas bien neuf.
Certes, il n’avait probablement jamais été autant question de Rachel, la mère, dans un roman de l’auteure. Mais les dialogues imaginés entre Rachel et Pierre sont du pur Christine Angot dans le texte. Certains peuvent apprécier sa manière de montrer comment il s’impose en menant le jeu en permanence, domptant sans difficulté la femme qui l’aime. D’autres, et nous en sommes, n’ont pas besoin de ces interminables conversations où les mêmes mécanismes se répètent, comme ils s’étaient déjà répétés dans les ouvrages qui le plaçaient face à sa fille. Il est manipulateur, on le savait. Rachel se laisse manipuler, on s’en doutait.
Pourtant, Christine Angot fait des efforts. Elle a intitulé son livre : Un amour impossible, avec la volonté d’expliquer pourquoi l’amour pour sa mère est à la fois ancré entre elles (elles se disent parfois qu’elles s’aiment) et gâché par tout ce qui s’est passé avec le père, sur quoi Rachel a fermé les yeux. A la mort de Pierre, Christine, qui ne se sentait pas prête à cette disparition alors qu’elle l’attendait, la vit mal. Les reproches peuvent enfin s’exprimer : « Il n’y avait personne pour me protéger quand j’ai rencontré mon père. Maintenant il n’y a personne pour m’aider à vivre sa mort. Ecoute. Nos relations sont foutues. »
Si Un amour impossible présente un certain intérêt, c’est par l’exploration de toutes les ambiguïtés dans les sentiments entre les trois principaux protagonistes de cette malsaine affaire familiale.

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