lundi 3 octobre 2016

Le polar flou de Christian Oster

Les romans de Christian Oster possèdent un charme singulier. On court un risque à le décrire. Chaque argument peut se retourner contre lui, nombre de lecteurs ne comprenant pas, à moins d’y aller voir, quelles sont les qualités propres à, par exemple et pour citer le livre qui vient de reparaître au format de poche, Le cœur du problème. L’ambiguïté tient à la faiblesse du commentaire face à la force de l’écriture romanesque. Mais aussi à une évidence : ce qui plaît à l’un peut ennuyer l’autre.
Prenons le risque. Les silhouettes des personnages de Christian Oster sont floues, leur caractère, indécis, leur parcours, hasardeux. Simon, comme d’autres dans les romans précédents, est placé devant une situation qu’il ne maîtrise pas, qu’il fait mine de dominer mais dont la suite des événements prouvera qu’elle était trop complexe pour lui. L’ouverture en fournit les principaux éléments : en rentrant chez lui, Simon trouve dans son salon le cadavre d’un homme, selon toute vraisemblance tombé de la mezzanine dont la balustrade est brisée. Diane, la compagne de Simon, est dans la maison, mais elle ne veut pas parler et s’en va.
Malgré le caractère improbable d’une scène à laquelle il se dit qu’il ne sera jamais confronté, le lecteur sent poindre une question : si j’étais à la place de Simon, comment réagirais-je ? Puis, heureusement pour sa tranquillité d’esprit, la question s’efface derrière les improvisations de Simon : placer le cadavre dans le coffre de la voiture, trouver de la glace pour éviter les odeurs, l’enterrer dans le jardin, vendre la maison après avoir fait réparer la balustrade… Chaque acte est pesé, mais à l’aune d’arguments peu solides.
Intervient un gendarme, Henri, à qui Simon est venu déclarer, histoire de paraître logique, la disparition de Diane. Henri est trop amical pour n’être pas soupçonneux. Passe l’épouse de l’homme dont le cadavre était dans le salon, et qui se demande ce que faisait le numéro de Diane dans le portable de son mari. Apparaissent quelques autres protagonistes d’une partie que, néanmoins, Simon joue seul, contre-lui-même.
Dans ce polar sans énigme, c’est l’état d’esprit de Simon qui devient le fil du récit, tout le reste étant anecdotique. Troublant.

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